Laurent Pernot
Le grand rocher
Circuit La croisée des chemins – L’Arbresle
Val des Chenevières
Habitué des œuvres monumentales installées dans l’espace public, Laurent Pernot aime à déployer la poésie du monde qui est le nôtre en reproduisant des éléments de la nature. Sur une place des plus urbaines : de gigantesques palmiers courbés par le vent, sur une plage : une voiture de sable le nez piqué dans les tréfonds sablonneux ; et toujours des personnages pour les habiter. Dans le cadre du parcours artistique et culturel Les Murmures du temps, il ne déroge pas à sa manière de faire en proposant « Le grand rocher » au Val des Chenevières.
Ce site, aménagé récemment, a été le théâtre, au fil des siècles, de nombreuses crues donnant lieu à tout autant de dégâts et, parfois, de grandes tragédies. Pour évoquer le danger et l’instabilité de ce lieu, l’artiste a imaginé son œuvre « à la fois comme l’image du monde tel qu’il est aujourd’hui : en équilibre, instable, au bord de l’effondrement, et comme une sorte d’île qui aurait été préservée de la vie et de la végétation – une sorte d’arche de Noé ». Assise sur un plateau, au sommet d’un rocher à la base frêle, une statue d’enfant porte son regard vers l’est, absorbé qu’il est par le soleil levant et les possibilités de l’avenir. Il incarne autant l’espoir que la peur de l’effondrement, des thématiques qui font la matière du travail de Laurent Pernot : « je m’intéresse au temps qui passe, à l’éphémère ; avec cet enfant au bord d’un précipice, sur un massif rocheux qui donne l’illusion qu’il risque de s’effondrer, je voulais rendre perceptible la fragilité du vivant et de l’environnement. »
Ce « Grand rocher » est également inspiré dans son imposante forme par des monolithes verticaux que l’on trouve partout dans le monde. En Namibie, en Amérique du Nord ou en Asie, ils sont sculptés par les océans ou divers phénomènes géologiques. Ici, l’artiste et son équipe l’ont ainsi pensé « de manière à ce qu’il donne l’impression d’avoir été sculpté, érodé par des crues, façonné par le flux des eaux sur la roche au fil du temps et des intempéries ». Il a nécessité pas moins d’un an de travail et mobilisé des corps de métiers très variés. Des ingénieurs ont procédé à des études de sol pour que la pièce soit résistante en dépit de la hauteur d’eau qui peut recouvrir le terrain, puis cette pièce a été fabriquée avec la collaboration d’entreprises de métallerie, des maçons, des terrassiers, des sculpteurs spécialisés dans la confection de fausses roches, des fondeurs et un paysagiste pour la partie végétalisée du sommet.
Inspirée dans sa texture et dans sa couleur de la pierre dorée du Pays de L’Arbresle, la roche artificielle du « Grand rocher » domine le val avec aplomb. Si le déséquilibre qu’elle symbolise prête à l’inquiétude, il prouve aussi l’imprévisible résistance de la matière. Perchée sur son trône de funambule, la statue de l’enfant vient dire, quant à elle, la résilience des êtres, leur capacité à regarder droit dans les yeux l’avenir qui s’offre à eux – tout incertain qu’il soit.
LE CONTEXTE PATRIMONIAL
Le bassin versant Brévenne-Turdine s’étend sur une superficie de 440 km2. C’est un secteur historiquement très touché par les inondations, des textes d’archives témoignent de crues datant de l’an 1196. Au cours des dernières décennies, le territoire a connu plusieurs inondations, la dernière datant du 22 novembre 2016.
Au Val des Chènevières, un poteau indique les hauteurs des dernières crues avant l’aménagement, soit plus de 2 m au-dessus de l’actuel niveau d’eau. Pour affronter ces problématiques, le Syndicat de Rivières Brévenne et Turdine (SYRIBT) a été créé en 2006. En 2012, un Plan de Prévention des Risques d’Inondation (PPRI) a été approuvé sur le territoire Brévenne-Turdine et permet de réglementer la gestion de l’urbanisme en fonction du risque d’inondation.